L’ours a toujours été dans la culture populaire, une espèce sur-représentée. En Occident c’est la figure de l’ours brun qui a d’abord été omniprésente dans les contes, légendes, blasons et arts. La figure de l’ours polaire a elle, en premier, fait l’objet de représentations de la part des populations vivant à leur contact. C’est seulement suite à l’exploration de ces territoires que les Occidentaux se sont emparés de ce sujet.
Les peuples inuits préhistoriques, comme les Okviks ou les Ipiutaks, ont été les premiers à représenter des ours polaires. Ces sculptures étaient généralement faites à partir d’ivoire de morse. Elles étaient peu volumineuses et facilement transportables. La finesse de ces réalisations impressionne encore aujourd’hui le spectateur.
Les premières gravures occidentales d’ours polaires font suite à la découverte de cette nouvelle espèce, nommée ursus maritimus. Sur ces gravures les ours sont dépeints scientifiquement avec de nombreux détails. Ces représentations laissent transparaitre une volonté d’exactitude et un souhait de documentation. Il s’agissait dès lors de faire connaître un animal alors inconnu en diffusant son image.
Par la suite les gravures ont été plus nombreuses. L’ours polaire était alors perçu comme la bête sauvage par excellence et était représenté sous des traits hostiles et féroces. L’ours brun étant déjà connu comme un animal dangereux, l’exotisme de l’ours polaire a renforcé le sentiment de méfiance à son égard.
Les inuits sont des peuples autochtones d’Amérique du Nord et des régions arctiques. Historiquement ces peuples côtoient donc les animaux polaires. Ces derniers ont toujours été au centre de leurs arts. Durant le XXe siècle, l’art inuit a connu un rebond particulier lui donnant une visibilité intéressante. Les sujets représentés sont principalement des animaux, voir des animaux mythologiques. Les oiseaux sont très présents, les ours polaires également. Ces derniers sont représentés à travers plusieurs mediums, de la gravure à la sculpture. C’est à cette époque que se développe la populaire figure de l’ours dansant. Il s’agit de représenter, par la sculpture principalement, des ours entrain de danser. L’ours polaire devient alors une figure humanisée, le caractère sauvage de l’animal est gommé.
Au XXe siècle, les sculpteurs se sont emparés de la figure de l’ours polaire. C’est François POMPON qui a ouvert cette voie avec son célèbre Ours blanc en 1922. Dans cette sculpture, Pompon opte pour l’économie de détails, des courbes et une surface lisse reflétant la lumière. Cela a pour conséquence de rendre compte de la lourdeur de l’animal tout en allégeant sa démarche. Ce dernier semble alors déambuler avec une facilité déconcertante. Cette représentation de l’animal fait fi de sa sauvagerie. Ses lignes épurées et harmonieuses le sortent du temps et en font un animal à part.
Dans sa lignée, d’autre sculpteurs tel Alexandre Zankoff, ont représenté les animaux polaires en gommant leurs aspects sauvages.
Le regard artistique posé sur les ours polaires a donc profondément changé au cours du XXe. L’aspect sauvage de ces animaux a eu tendance à disparaître au profit d’une représentation plus bienveillante. Ce nouveau regard posé par les artistes peut être illustré par le travail de Kyriakos KAZIRAS. Ce dernier évoque l’ours polaire dans des compositions teintées de blanc. Les ours sont saisis en gros plan, dans des instants de vie. De ce travail se dégage une douceur réconfortante.